c'est la danse des canardsJe n’ai plus que deux hommes dans ma vie. Le premier se nomme Ben... et l’autre Jerry’s. "Je vous présente votre nouveau collègue, le professeur de sport, Leyo Lennon !". Sept heures trente du matin, c'est tôt... trop tôt. J'ai mis dix bonnes minutes à relever ma tête de mon gobelet de café, mon regard se posant pour la toute première fois sur Leyo. Cela faisait quatre ans que je travaillais comme conseillère d'orientation dans ce lycée et... on ne pouvait pas dire que j'avais été aveuglée par trop de beauté... Enfin, jusqu'au jour où Leyo a débarqué.
"Tu dois être Millicent ? Le proviseur m'a beaucoup parlé de toi ! Ça te dérange si je m'assois en face de toi ?". Je fronçais les sourcils, ingurgitant ses paroles avec un peu de mal.
"Oulà, calmos, j'ai même pas encore fini mon café.". Ouais, je n'ai jamais été du matin. Tout le monde le savait ici, même les élèves, qui venaient pour faire une sieste dans mon bureau, le matin. Leyo se mit à rire et s'installa sur la chaise en face de la mienne, alors que j'étais totalement affalée sur la table qui nous séparait.
"T'es prof de quoi ?". A en voir son allure décontractée, j'aurais dit philosophie... mais j'ai toujours été une vraie buse pour deviner des choses.
"Sport. J'ai hâte de rencontrer les élèves !". Il était vraiment super ce mec, m'étais-je dis ce jour là, appréciant sa joie de vivre presque contagieuse.
"Ah bah tiens, tu tombes bien. J'ai une question pour toi : pourquoi est-ce que vous vous évertuez à faire faire des tours de terrain aux élèves ? Y a rien de plus chiant !". Et une fois de plus, il se mit à rire, alors que les souvenirs immergeaient dans mon esprit. J'ai toujours été nulle en sport. A l'école, je me prenais toujours le ballon de basket dans la tronche et un jour, j'ai même fini aux urgences après avoir sauté sur un trampoline. Le sport, c'est le mal, point.
"Parce qu'on aime bien torturer les élèves !".
En fait, j'ai rapidement compris que Leyo était le prof le plus cool du lycée. J'entretenais de bons rapports avec mes autres collègues - à part la prof de maths qui était une vraie connasse, mais bon -, mais avec Leyo, c'était différent. Peut-être étais-ce notre proximité au niveau de l'âge qui nous rendait si proches ? Quoiqu'il en soit, chaque midi, on les passait ensemble.
"J'te propose un deal", commença-t-il en s'asseyant à notre table habituelle. Il était un peu en retard, mais je ne lui en tenais pas rigueur.
"je t'échange mon gâteau au chocolat contre tes frites !". Halleluya ! Enfin quelqu'un qui me comprenait et acceptait ma dépendance au chocolat. C'est donc sourire aux lèvres que j'acceptais sa proposition.
"DEAL !!". On échangea nos assiettes, heureux de cette transaction alimentaire.
"Y a pas à dire, t'es vraiment un bon pote !". Deux minutes plus tard, j'avais la bouche pleine de chocolat et j'étais aux anges. La vie est belle dès qu'on mange un peu de chocolat ! D'ailleurs, c'est scientifiquement prouvé ! Deux carreaux de chocolat tous les jours aident à nous rendre plus heureux ! Bon, si vous êtes allergiques au chocolat, oubliez, mais pour les autres, ça peut être utile ! Plus besoin de dépenser un fric monstre chez le psy ! Bouffez du Milka les copains !
"Dis, tu viens à la sortie au musée vendredi ?", me demanda Leyo, avalant une dernière frite. Je haussais les épaules, buvant une grande gorgée d'eau fraiche.
"Non. Regardez des tableaux tous blancs avec un point rouge au milieu et appeler ça de l'art, c'est pas trop mon délire...". Il sembla déçu, l'espace d'un instant.
"Fait chier, je serai seul avec Isa...". J'avais presque envie de rire. Isabelle était la professeure de français. Sensiblement de nos âges, elle tentait tant bien que mal de se faire une place dans notre duo... mais ça marchait pas, parce qu'un duo c'est à deux et pas à trois... et puis elle était pas drôle aussi. Je voyais bien qu'elle était attirée par Leyo, mais ce dernier avait du mal avec la jeune femme, la supportant de moins en moins.
"Ouhouuuu ça va draguer sous un tableau de Picasso !", le taquinais-je alors qu'il rougissait un peu, gêné.
"Hors de question ! Y aura les gamins et en plus, Isa c'est pas du tout mon style !". Leyo et moi étions de très bons amis, mais jamais nous n'avions réellement parlé de nos vies sentimentales. Pourtant, je le savais célibataire et malgré le caractère coincé d'Isabelle, il fallait lui reconnaître une grande beauté.
"Ah bon ? et c'est quoi ton style ?", demandais-je, enfournant une nouvelle cuillère de chocolat dans ma bouche.
"J'suis plus branché petites brunettes, avec de grands yeux bleus et un humour pourri !". Il ne m'avait pas lâché du regard, et je stoppais toute mastication... me demandant si cette remarque m'était destinée. C'est vrai quoi, j'suis petite, brune et j'ai les yeux bleus (on passera sur l'humour pourri). Pourtant, pas le temps de répondre quelque chose que l’alarme incendie nous perça les tympans.